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Compte-rendu

Réanimation liquidienne et pancréatite aiguë : point trop n’en faut !

Réanimation liquidienne et pancréatite aiguë : point trop n’en faut !

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Pancréatite , Hydratation , Réanimation , Liquidienne , Agressive , WATERFALL

Réanimation liquidienne et pancréatite aiguë : point trop n’en faut !

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Pancréatite , Hydratation , Réanimation , Liquidienne , Agressive , WATERFALL

Aggressive or Moderate Fluid Resuscitation in Acute Pancreatitis.

E. de-Madaria et al., NEJM, 15.09.2022

Introduction

La réanimation liquidienne représente une des pierres angulaires du traitement de la pancréatite aiguë dans le but d’éviter une hypoperfusion et une nécrose pancréatique. Néanmoins, la quantité idéale d’hydratation intraveineuse reste sujet à controverse. L’étude WATERFALL vient questionner les pratiques actuelles.

Méthode

Etude de supériorité randomisée contrôlée open-label, multicentrique. Inclusion : Patientes >18 ans avec pancréatite aiguë diagnostiquée dans les 8h précédant l’inclusion selon la classification révisée d’Atlanta. Exclusion : signes cliniques de surcharge ou d’insuffisance cardiaque à l'inclusion, HTA non contrôlée, insuffisance cardiaque NYHA II ou FEVG <50%, cirrhose décompensée, état de choc ou insuffisance respiratoire (PaO2/FIO2 ≤300), comorbidité sévère avec espérance de vie <1 an, pancréatite chronique connue, dysélectrolytémie. Intervention : Hydratation IV par Ringer-Lactate de façon agressive (20 ml/kg en bolus sur 2h puis 3 ml/kg/h en continu) versus modérée (10 ml/kg en bolus sur 2h seulement en cas d’hypovolémie puis 1.5ml/kg/h en continu), avec ajustement de l’hydratation en fonction de l’état clinique du patient. Issue primaire : Incidence de pancréatite aiguë modérément sévère à sévère définie par la classification d’Atlanta révisée. Issues secondaires (principales) : Survenue de signes de surcharge, de défaillance d’organes et complications locales après randomisation.

Résultats

Inclusion de 249 patient.e.s (âge moyen 56.5 ans, 51% de femmes, 51.8% avec hypovolémie), dont 122 dans le groupe d’hydratation agressive. Pas de différence dans l’incidence de pancréatite modérément sévère à sévère dans les deux groupes d’hydratation, agressive ou modérée (22.1% vs 17.3%, risque relatif ajusté 1.30 ; IC 95%, 0.78 à 2.18 ; p = 0.32). Incidence plus élevée des signes de surcharge dans le groupe d’hydratation agressive vs modérée (20.5% vs 6.3%, risque relatif ajusté 2.85 ; IC 95%, 1.36 à 5.94 ; p = 0.004).

Discussion

Etude avec méthodologie soigneusement élaborée, néanmoins open-label. L’étude a été précocement interrompue pour des raisons de sécurité, l’hydratation IV agressive menant à davantage de surcharge en l’absence de bénéfice sur les issues étudiées. La taille de l’échantillon ainsi amputée peut avoir mené à l’absence de différence statistiquement significative entre les deux groupes pour l’issue primaire, du fait d’une diminution de la puissance. Dans l’ensemble, les résultats semblent néanmoins favoriser le groupe avec hydratation IV modérée.

Autre limitation : les patients à risque de surcharge ont été exclus de l’étude avec, de ce fait, une sélection possible de patients moins sévèrement atteints. Leur présence dans l’étude renforcerait le plus probablement le message général en faveur d’une hydratation modérée.

Conclusion

Cette étude va à l’encontre de certaines recommandations actuelles pour le traitement de la pancréatite aiguë qui prônent une hydratation IV agressive alors que cela semble plus délétère que bénéfique. En pratique, l’étude pointe sur l’importance d’une hydratation modérée et adaptée à une évaluation clinique et biologique des patients afin d’éviter une surcharge liquidienne néfaste.

Date de publication Auteurs
03.10.2022

Sabine Ammann