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Compte-rendu

Les DOACs ? Pas forcément bons à tout faire !...

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fibrillation auriculaire, FA, FA valvulaire, Rivaroxaban, cardiopathie rhumatismale,

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Rivaroxaban in Rheumatic Heart Disease-Associated Atrial Fibrillation

Stuart J. Connolly et al., NEJM, 15.09.2022

Introduction

Les patients atteints de fibrillation auriculaire (FA) présentent un risque accru d'accident vasculaire cérébral (AVC) embolique en raison de la formation de thrombus dans l'oreillette gauche. Dans les pays à revenu élevé, l’origine de la FA est le plus souvent liée à une hypertension systémique, une cardiopathie ischémique ou un âge avancé. Cependant, dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, les cardiopathies rhumatismales restent une cause importante d'hypertrophie et de FA. Des essais randomisés ont montré l'efficacité des antagonistes de la vitamine K (AVK) pour la prévention des AVC chez les patients atteints de FA. Le besoin de médicaments plus simples à administrer que les AVK conduit au développement des inhibiteurs du facteur Xa, i.e. DOACs – Direct Oral AntiCoagulants (e.g. rivaroxaban). Des essais cliniques randomisés ont montré que les DOACs sont aussi efficaces que les AVK pour la prévention des AVC et présentent un risque plus faible d'hémorragie intracrânienne. Cependant, ces études excluaient les patients avec cardiopathie rhumatismale.

Méthode

Etude randomisée, open-label, multicentrique (Afrique, Asie et Amérique latine), de non-infériorité. Inclusion : >18 ans, cardiopathie rhumatismale prouvée par échocardiographie et FA ou flutter auriculaire documentés. Pour que les patients soient éligibles, au moins l'un des critères suivants était également requis : un score CHA2DS2-VASc ≥ 2, une sténose mitrale avec surface ne dépassant pas 2 cm2, ou preuve échocardiographique d'un contraste spontané de l'oreillette gauche ou thrombus auriculaire gauche. Exclusion : présence d'une valve cardiaque mécanique ou probabilité d'en recevoir une dans les 6 mois, utilisation d'une double thérapie antiplaquettaire, traitement par inhibiteurs puissants du CYP3A4 et de la glycoprotéine P, présence d'une insuffisance rénale sévère (DFG estimé <15/minute). Intervention : répartition aléatoire dans un rapport 1:1 pour recevoir soit rivaroxaban (dose 20mg ou 15mg/j selon fonction rénale), soit AVK (dose ajustée). Issue primaire : composite d'AVC, d’embolie systémique, d’infarctus du myocarde et de décès de cause vasculaire (cardiaque ou non).

Résultats

4’531 inclus.e.s dans l'analyse finale. Age moyen : 50,5 ans. Femmes : 72,3%. Arrêt définitif du traitement plus fréquent avec rivaroxaban qu'avec traitement par AVK, à toutes les visites. Dans l'analyse en « intention de traiter », 560 patients dans le groupe rivaroxaban et 446 dans le groupe AVK ont eu un événement primaire. La durée moyenne de survie restreinte était de 1’599 jours dans le groupe rivaroxaban et 1’675 jours dans le groupe AVK (différence, -76 jours ; intervalle de confiance [IC] à 95%, -121 à -31 ; P<0,001). Incidence plus élevée de décès dans le groupe rivaroxaban que dans groupe AVK (durée moyenne de survie restreinte, 1’608 jours contre 1’680 jours ; différence, -72 jours ; IC à 95 %, -117 à -28). Aucune différence significative entre les groupes concernant le taux d'hémorragie majeure.

Discussion

Chez les patients souffrant de FA associée à une cardiopathie rhumatismale, le traitement par AVK a entraîné un taux plus faible d'événements cardiovasculaires composites ou de décès que le traitement par le rivaroxaban, sans que le taux de saignement ne soit plus élevé. On peut se demander si les rendez-vous fréquents pour l’adaptation des AVK ont permis de détecter et de prendre en charge plus précocement des complications qui auraient pu mener au décès.

Conclusion

Une des rares études randomisées portant sur l'anticoagulation de la FA dans un contexte valvulaire (maladie rhumatismale). Etonnamment, l’issue composite est meilleure sous AVK que sous rivaroxaban avec une mortalité cardiovasculaire augmentée sous DOAC, et non en raison d’événements hémorragiques. Etude qui cherchait à montrer une non-infériorité du rivaroxaban pour proposer ce traitement plus simple d’utilisation à une population qui certes nous touche moins en Suisse mais qu'on peut tout de même retrouver chez des populations immigrées (e.g. Afrique, Asie et Amérique latine). Eh bien non, les DOACs ne sont pas toujours forcément meilleurs que les AVK…

Date de publication Auteurs
31.10.2022

Pierre Alexandre Bart